Constat alarmant du rapport du Haut Conseil à l'Egalité
- Roxanne Bourdin
- 22 févr. 2023
- 3 min de lecture
Peut-être avez-vous vu passer le dernier rapport annuel du Haut Conseil d'Egalité qui a beaucoup étonné. Il met en avant une présence encore très forte du sexisme en France. Un sexisme qui s'inscrit dans un continuum des violences sexuelles «faisant lit» des agressions.
Pourquoi malgré la libération de la parole, une sensibilisation au sujet et certaines avancées, le sexisme reste alors autant ancré ?
Le sujet est vraiment vaste et engage des raisons à la fois sociales, sociologiques, psychologiques, systémiques qui ne peuvent être toutes expliquées ici.
Néanmoins, voici quelques pistes de réflexion pour essayer de déconstruire un système qui heurtent à la fois les femmes et les hommes.
Quelques données révélées par le rapport:
33% des Françaises ont déjà eu un rapport sexuel suite à l'insistance de leur partenaire (alors qu'elles n'en avaient pas envie)
90% des femmes adoptent des conduites d'évitement pour éviter des actes sexistes
22% des hommes âgés de 22 à 34 ans en France ne voient pas de problème à ce qu'un homme gifle sa conjointe
50% de hommes considèrent que l'image des femmes véhiculées dans les films pornographiques n'est pas un problème.
80% des femmes déclarent avoir personnellement vécues des situations sexistes en 2022
37% des femmes ont déjà vécu une situation de non-consentement.
Qu'en est-il alors du rapport des hommes face à la masculinité et l'amour ?
Dans La volonté de changer, Bell Hooks mets en avant l'idée que les hommes doivent se faire violence et violenter leurs proches pour devenir des dominants, mutilant par là même leur vie affective.
En apprenant à recourir à la dissimulation, les hommes apprennent à dissimuler leur rage, leur sentiment d'impuissance. Ils n'ont aucune base solide sur laquelle construire une saine estime de soi, car ils apprennent à se créer une fausse identité pour maintenir la domination masculine.
Porter un masque en permanence pour affirmer sa présence masculine, c'est vivre en permanence dans le mensonge, c'est être perpétuellement privé de bien-être et d'un sens authentique de l'identité. Cette fausseté provoque une grande souffrance émotionnelle. Leurs rituels de domination les aident à soulager cette souffrance. Plus cette souffrance s'intensifie, plus leur besoin de faire violence, de dominer et de maltraiter les autres s'intensifie également. Barbara Deming explique « Je pense que la raison pour laquelle les hommes sont si violents, c'est qu'ils savent, au fond d'eux-mêmes, qu'ils vivent dans le mensonge, et qu'ils en sont furieux. Il est impossible d'être heureux lorsqu'on vit dans le mensonge, et ils sont furieux d'être pris à mentir. Mais puisqu'ils ne savent pas comment briser ce mensonge, ils s'y enfoncent encore plus ».
Ceci fait écho avec la définition de la pulsion de mort par Freud dans Pourquoi la guerre ? (1933) où il met en avant le paradoxe d'une destructivité où le sujet se sauve en détruisant l'autre.
De plus, dans Le Sacre de la guerre, Barbara Ehrenreich, rappelle qu'en "attribuant aux seuls hommes le statut de prédateur triomphant, les humains ont réussi à "oublier" cette préhistoire cauchemardesque où ils étaient, hommes et femme, la proie d'animaux plus grands et plus forts qu'eux. La différence de genre, en d'autres termes, efface notre passé commun en tant que proies et affirme simultanément que le statut de prédateur est inné et "naturel", du moins chez les hommes". Elle attire l'attention sur le fait que la guerre n'est pas simplement une occupation masculine mais plutôt "une activité qui a souvent servi à définir la masculinité elle-même". Elle soutient que la guerre et la masculinité agressive se renforcent mutuellement.
La nature genrée de la guerre fait des hommes des prédateurs et des femmes des proies.
Les femmes sont-elles victimes des hommes, ou d'un système ?
Il est important de rappeler que le maintien patriarcal vivent également de la part des femmes:
Toujours d'après le rapport, 65% des femmes pensent que les hommes doivent les protéger.
Ceci pourrait conduire les hommes à se dire qu'on leur demande d'endosser le rôle du protecteur, d'être fort, puissant, dominant: en somme, d'obéir au modèle de virilité entretenu par la société. Si l'homme dévoile sa souffrance, exprime ses sentiments, il peut paraître faible, moins viril.
En découle un sentiment de malaise de la part de certaines femmes, car cela ne correspond pas à l'idée patriarcale qu'elles ont de l'homme. Elles leur confirment donc qu'ils n'ont pas le droit d'être dans l'émotion et la souffrance. Ce schéma se répercute dans l'éducation des enfants et entretient un cercle vicieux. Malheureusement, certains comportements persistent donc, comme le montre ce rapport.





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